RĂ©cit d’une course – Swissman Xtreme Triathlon 2025 🇹🇭

La premiĂšre fois que j’ai dĂ©cidĂ© de tenter le tirage au sort pour le Swissman, c’était aprĂšs ĂȘtre tombĂ©e dessus par hasard en voyant leur teaser. En voyant le parcours, sa beautĂ©, les lacs suisses, et la difficultĂ©, cela m’a donnĂ© envie de me lancer.

Pour rappel le Swissman c’est : 3,8km de natation, 180km de vĂ©lo et 3880m de dĂ©nivelĂ© et un marathon avec 1990m de dĂ©nivelĂ©. C’était un peu fou, alors je l’ai tentĂ©.

Quelques temps aprĂšs la premiĂšre partie de l’inscription, je faisais les championnats du monde de 70.3 Ironman en Nouvelle-ZĂ©lande en catĂ©gorie d’ñge. AprĂšs cette derniĂšre course qui a causĂ©e pas mal de fatigue physique et mentale, j’ai pris un bon 3 semaines de off, ayant enchainĂ© pas mal de compĂ©tition et pas mal de fatigue les mois avant. Et puis, un jour, je reçois un mail de l’organisation pour me fĂ©liciter d’ĂȘtre sĂ©lectionnĂ©e pour le Swissman. Je suis toute excitĂ©e suite Ă  cette nouvelle et m’enregistre au plus vite.

C’est le dĂ©but d’une aventure et d’une prĂ©paration logistique spĂ©cifique et fastidieuse pour cette course. Je sais que la rĂ©cupĂ©ration de la saison 2024 n’est pas encore lĂ , mais je sais aussi que j’ai le temps de voir venir pour me prĂ©parer de façon optimale avec mon coach, Yves St-Louis.


Le point de rupture

J’enchaine avec un stage au Kenya pour la formation 3.0 de La Clinique du Coureur, lĂ , je dĂ©couvre l’entrainement en course Ă  pied si spĂ©cifique aux Kenyans dans leur contrĂ©e et sur leur terre rouge.

Cependant, quelque chose cloche. Force est de constater que ma douleur au tibia est revenue. J’adapte l’intensitĂ©, j’adapte le volume, ne sachant pas encore vraiment ce que c’est. J’en discute avec un mĂ©decin sur place et mon physio/kinĂ© en qui j’ai le plus confiance, Blaise Dubois, ils me conseillent tous deux d’investiguer pour savoir ce qu’il en est.

La semaine se passe, les craintes et les doutes sont lĂ , et je rentre ensuite chez moi pour investiguer avec mon mĂ©decin. J’ai passĂ© une radio. Un simple contrĂŽle pour voir si ma pathologie est revenue, parce qu’un inconfort revenait, lĂ  oĂč il ne devrait plus. Le verdict : un ostĂ©ome, encore. Rien de grave, rien qui empĂȘchait l’entraĂźnement. Pas rassurant, mais pas alarmant non plus. Pour ceux qui ne connaissent pas mon passĂ©, l’ostĂ©ome est une tumeur osseuse bĂ©nigne pour laquelle j’ai Ă©tĂ© opĂ©rĂ© 3 fois. Le triathlon s’est avĂ©rĂ© ĂȘtre le seul sport dans lequel je n’avais pas de douleur, comme une aubaine, j’ai pu le pratiquer avec plaisir, progressivitĂ©, quantification de la charge grĂące aux personnes qui m’ont entourĂ©es depuis 2019.

Mais comme souvent avec moi, rien n’est jamais tout Ă  fait simple. On a creusĂ© un peu plus car le mĂ©decin voulait en savoir davantage. Nous planifions un spect scan pour dans 2 semaines pour vĂ©rifier l’ampleur de l’ostĂ©ome. J’ai l’accord pour courir jusque lĂ  car la pathologie ne l’interdit pas. Le spect scan est passĂ© et montre ce que je ne voulais pas voir et pour ĂȘtre honnĂȘte, ce Ă  quoi je n’avais pas pensĂ© : une microfissure. Une fracture de stress, lĂ , pile Ă  l’endroit oĂč j’ai dĂ©jĂ  Ă©tĂ© opĂ©rĂ©e trois fois. La crĂȘte tibiale. Un endroit devenu fragile Ă  vie. Un endroit oĂč la cicatrisation est lente, compliquĂ©e, incertaine. Et une zone oĂč chaque pas compte, dans tous les sens du terme. J’ai l’impression d’avoir perdu 2 semaines de traitement en continuant la course, je suis en colĂšre, j’accuse le coup.

LĂ , Ă  deux mois et demi du Swissman.

Deux mois d’un rĂȘve que je prĂ©pare depuis longtemps, deux mois d’un objectif qui me fait vibrer autant qu’il me fait peur. Et voilĂ  que tout est remis en question ou presque. J’ai dĂ» stopper la course Ă  pied. ComplĂštement. Brutalement.

Alors je dĂ©cide de bien m’entourer et, en plus de mon coach, je demande au physio/kinĂ© en qui j’ai le plus confiance de suivre mon traitement. On adapte, on croise, on modifie, on essaie de trouver des combines pour que ça fonctionne en sachant pertinemment que le timing est court.

Je continue le vĂ©lo. Beaucoup. Mais sous contrĂŽle. Pas de douleurs, jamais. La natation aussi. Je m’accroche Ă  ce que je peux. Mais soyons honnĂȘtes : la crainte est lĂ . Bien prĂ©sente. Pas pour les kilomĂštres. Pour le moment oĂč il faudra recourir. Pour la partie oĂč tout peut casser. LittĂ©ralement. Le doute s’installe, est-ce que cela va me limiter et mĂȘme pire, m’empĂȘcher de finir ce Swissman ?

J’ai dĂ» tout rĂ©adapter. L’entraĂźnement. Le plan. Mes attentes. Mon discours intĂ©rieur.
J’ai dĂ» faire de la place Ă  l’incertitude. Et accepter que la ligne de dĂ©part, si j’y arrive, sera une victoire en soi.

Il y avait aussi ce semi-marathon d’Andenne, un mois avant le Swissman. Il me tenait Ă  cƓur. Vraiment. Pour le partage avec ma compagne, ma famille, des amis, une personne que j’entraĂźne et Ă  qui je tiens Ă©normĂ©ment. J’avais envie d’ĂȘtre lĂ , avec eux, dans l’effort et dans la joie. Mais j’ai dĂ» y renoncer. Parce que ce semi, aussi symbolique soit-il, compromettait clairement ma prĂ©sence sur la ligne de dĂ©part du Swissman. J’ai choisi de prĂ©server une chance. Une seule. De pouvoir finir cette course. MĂȘme si je ne sais pas dans quel Ă©tat sera mon tibia Ă  la fin.

Il faut parfois renoncer Ă  certaines batailles pour rĂ©ussir le vrai combat. Et ce combat-lĂ , il vaut que je m’économise. Il vaut tous les sacrifices.

C’est peut-ĂȘtre ça, ĂȘtre athlĂšte. Savoir avancer sans garantie. Ne pas confondre renoncer et s’écouter. Continuer Ă  croire, mĂȘme quand le corps devient fragile. Et si je ne peux pas courir tout de suite, je peux encore ĂȘtre lĂ . Encore me battre. Encore espĂ©rer.

Je ne sais pas encore si je passerai cette ligne d’arrivĂ©e. Mais ce que je sais, c’est que je ferai tout pour pouvoir y ĂȘtre. Forte, lucide, et fidĂšle Ă  ce que je suis : quelqu’un qui n’a jamais rien fait comme tout le monde, mais qui ne baisse jamais les bras et qui est dĂ©terminĂ©e.


Team Supporter : Frankie, Marine & Steph

Je suis entourĂ©e par pas mal de personnes, dont certaines m’épaulent au quotidien pour m’aider Ă  rebondir. Certes, ma rĂ©silience, je l’ai construite suite aux obstacles rencontrĂ©s et aux nombreux essais-erreurs, mais je peux aussi dire que les personnes croisĂ©es dans ma vie, peu importe la maniĂšre dont cela s’est passĂ©, m’ont permis de renforcer cette qualitĂ©.

Alors, j’essaie de tout faire, de tout mettre en Ɠuvre pour ĂȘtre prĂȘte le jour J.

Je constitue mon team supporter, que je vous ai dĂ©jĂ  prĂ©sentĂ© si vous me suivez, et je planifie des visios avec eux pour que tout soit au point le jour J. Je leur fais part de mes craintes, de mes besoins, de mes envies. Ils sont Ă  l’écoute et je sais qu’ils seront lĂ  pour moi, pour m’épauler, pour m’aider le jour mĂȘme.

Je sais que Frankie sera lĂ  avec moi la semaine avant la course, compagnon de route et logisticienne hors pair. Elle m’a dĂ©jĂ  suivie sur beaucoup de courses et sait parfaitement comment je fonctionne.

Marine est lĂ  non seulement pour le cĂŽtĂ© mental, mais aussi pour le partage de la course avec celle qui partage ma vie. Je l’ai choisie avant mĂȘme qu’elle ne me connaisse et, depuis, on ne s’est plus quittĂ©es. Elle est ma compagne, mais aussi ma prĂ©paratrice mentale.

Steph, quant Ă  lui, est lĂ  parce qu’il adore les dĂ©fis fous, parce qu’il est le roi de la mĂ©canique, de l’imprĂ©vu, et parce qu’il sait mettre l’ambiance avant et pendant une course.

On est Ă  quelques semaines de la course : j’ai pu prĂ©parer des sĂ©ances de vĂ©lo dans les cols des Hautes Vosges, travailler ma natation en eau libre, et mĂȘme recourir en trail en Alsace avec Marine, ainsi qu’en course sur route, mĂȘme si j’ai dĂ» adapter mes sĂ©ances de nombreuses fois pour Ă©viter les douleurs. Je me rends compte qu’avec cette blessure, les nombreuses heures de vĂ©lo ne peuvent ĂȘtre que bĂ©nĂ©fiques pour le parcours du Swissman, qui s’annonce difficile. Comme quoi, il faut savoir transformer chaque obstacle en force pour la suite.

La prĂ©paration mentale avec Marine a pour but d’anticiper certaines difficultĂ©s de la course et quelques craintes : notamment mes virages Ă  droite, la gestion de la douleur en course Ă  pied, la gestion de l’alimentation Ă  mi-parcours, ou encore la difficultĂ© de la derniĂšre montĂ©e en course Ă  pied. Elle aborde avec moi diffĂ©rentes techniques pour m’aider.

Deux semaines avant la course, alors que les prĂ©paratifs s’enchaĂźnent, je rencontre Steph pour un dernier check du vĂ©lo, et je fais un dernier tour de ce qu’il faut avec Frankie. Tout a l’air prĂȘt ! C’est parti pour le trajet avec tout le matĂ©riel et le mental nĂ©cessaires pour affronter cette Ă©preuve, qui peut ĂȘtre, comme son nom l’indique, extrĂȘme.


Les obstacles s’enchainent

Avec Frankie, on entame la route vers la Suisse en faisant plusieurs escales pour prendre le temps et ne pas cumuler trop de fatigue. On en profite pour visiter des coins de la France encore mĂ©connus pour nous. On s’arrĂȘte au lac de Pierre-PercĂ©e, une trĂšs belle rĂ©gion qui me rappelle mes voyages au QuĂ©bec. « Le Petit Canada lorrain », comme ils disent. LĂ , je trĂ©buche sur une branche en Ă©tant pieds nus et me blesse Ă  l’orteil. Jusqu’ici, je ne m’inquiĂšte pas trop. Ensuite, je dĂ©cide de m’occuper d’un ongle incarné ; Ă©videmment, ça s’infecte, et c’est parti pour traiter mes deux orteils. DĂ©cidĂ©ment, pas de chance sur ce coup-lĂ .

Le lendemain, avant de partir jusqu’à la frontiĂšre suisse, je remarque une ligne rouge sur mon bras. Je me dis que ça doit ĂȘtre une trace des draps aprĂšs ma sieste et ne m’alarme pas tout de suite. Sauf que, le soir, la ligne est toujours lĂ , mais moins marquĂ©e. J’investigue donc avant de passer la frontiĂšre et nous supposons que c’est une lymphangite, ou en tout cas que ça y ressemble, et que ce n’est pas forcĂ©ment une bonne nouvelle. Du coup, je dĂ©cide de positiver et de me dire : « la ligne a fortement diminuĂ© le soir et encore plus le lendemain matin, je verrai aprĂšs le passage de la frontiĂšre comment ça Ă©volue, puisque je ne ressens aucun des symptĂŽmes spĂ©cifiques Ă  cette pathologie. »

Nous continuons dĂšs lors la route avec Frankie en direction de Thun, une ville dont je me rappelle on ne peut mieux suite Ă  mon Ironman rĂ©alisĂ© le 9 juillet 2023 au mĂȘme endroit. Que de souvenirs dans ce lac bleu turquoise entourĂ© de montagnes et de paysages tous aussi beaux les uns que les autres. Je me rappelle aussi pourquoi j’aime faire des courses en Suisse, en montagne, dans les Alpes, au QuĂ©bec ou en Nouvelle-ZĂ©lande. Au-delĂ  du challenge et de la possibilitĂ© de vivre des aventures incroyables, les paysages que l’on rencontre sont majestueux, et on peut en profiter toute la course : en tournant la tĂȘte pour respirer en natation, en montant les cols Ă  vĂ©lo, en courant le long des lacs, entourĂ©s de personnes qui nous encouragent, peu importe leur pays natal.

Je profite d’ĂȘtre Ă  Thun pour m’entraĂźner en eau libre dans le lac encore quelques fois avant la course, histoire d’essayer d’avoir de bonnes sensations. On y reste trois jours, et j’en profite chaque jour. Frankie m’aide Ă  nouveau avec la logistique pendant que je barbote dans l’eau. Avant de partir pour Grindelwald, je lui demande si je peux refaire un dernier plouf avant la sortie eau libre encadrĂ©e du vendredi Ă  Ascona pour la course. Et lĂ , en rentrant dans l’eau, je me blesse sous le pied : une petite entaille qui n’a l’air de rien, mais qui va m’embĂȘter un peu plus que prĂ©vu et me remettre un doute sur la partie course Ă  pied, qui me fait dĂ©jĂ  suffisamment peur.


Direction Grindelwald

Nous partons avec Frankie en direction de Grindelwald pour y installer les deux vans dans lesquels nous logerons avant et aprĂšs la course. Elle y restera toute la fin de semaine, tandis que je rejoindrai Steph avec Marine Ă  Ascona pour le dĂ©part. Marine nous rejoint en fin de journĂ©e et la team est presque au complet. On en profite pour faire une courte sortie vĂ©lo, et on sent dĂ©jĂ  bien la chaleur, mĂȘme en altitude.

Grindelwald, c’est le lieu du checkpoint de la course Ă  pied au 33e kilomĂštre, juste avant la derniĂšre montĂ©e vers Kleine Scheidegg et ses 1000 mĂštres de dĂ©nivelĂ© Ă  13% de moyenne. Je n’avais pas eu la possibilitĂ© de repĂ©rer le parcours, ni Ă  pied ni Ă  vĂ©lo, chose qui ne m’arrive pas souvent et qui me met dans le doute Ă©galement. Avec le recul, je suis contente de ne pas avoir vu le dĂ©but de la course Ă  pied, car je ne savais pas que ce genre de montĂ©e se marchait. Certains ont trouvĂ© cela « facile » ; de mon cĂŽtĂ©, j’étais assez intimidĂ©e.

Ensuite, nous mettons tout dans la voiture de Marine pour rejoindre Steph Ă  un point de rendez-vous en direction d’Ascona. Frankie conduit, et c’est elle qui ramĂšnera la voiture Ă  Grindelwald. On profite de la route pour s’imprĂ©gner des paysages et de la longueur du circuit. On retrouve Steph, tout est chargĂ© dans sa voiture grĂące Ă  ses talents de pro du TĂ©tris, et on dit au revoir Ă  Frankie avant de prendre la route pour Ascona.

Tout roule, on dirait que tout est bien orchestrĂ©. Le stress monte, vais-je ĂȘtre capable de faire cette Ă©preuve et cela dans les temps ?

Le vendredi, nous partons au check-in avant quoi une petite natation dans le lac me rassure sur les appuis et l’envie de transposer ce qui a Ă©tĂ© fait Ă  l’entrainement dans ce lac entourĂ© de montagnes et oĂč la chaleur m’accable dĂ©jĂ . J’en profite pour parler technique avec Marine et faire descendre le stress en faisant le remake d’Alerte Ă  Malibu en sortant de l’eau.

On rĂ©cupĂšre avec ma team le dossard, le tracker, bref, tout le matĂ©riel obligatoire pour la course, et nous profitons d’un dernier verre avant d’aller nous coucher pour affronter cette journĂ©e. Steph essaie de me faire rire pour relĂącher la pression, Marine me rassure sur mes capacitĂ©s, et nous rentrons ensuite Ă  l’appartement pour les derniers prĂ©paratifs.

Tout est organisĂ© pour la voiture et les diffĂ©rents points du parcours. Nous faisons un dernier briefing avec Marine et Steph pour qu’ils sachent quoi faire avec chaque box et chaque sac, et ils planifient ensemble leur organisation pour la partie course Ă  pied, sur laquelle ils m’accompagneront. Je prĂ©pare Ă  manger de mon cĂŽtĂ©, et on se retrouve Ă  table avant d’aller charger tout le matĂ©riel dans la voiture et faire la derniĂšre vĂ©rification du vĂ©lo, puis de dormir les quelques heures qu’il reste.


Jour de course đŸŠâ€â™€ïžđŸšŽâ€â™€ïžđŸƒâ€â™€ïžđŸ”ïž

Probablement l’épreuve la plus difficile Ă©motionnellement, mentalement et physiquement, avec un mĂ©lange de sensations Ă  l’arrivĂ©e que les mots peinent Ă  exprimer pour dĂ©crire ce qui s’est passĂ© durant cet Xtreme Triathlon. J’ai tentĂ© de retranscrire au mieux ce que j’ai vĂ©cu et traversé ; mĂȘme si les Ă©motions ne seront peut-ĂȘtre pas dĂ©crites Ă  100 %, vous allez pouvoir revivre cette course avec moi. Il m’a fallu une semaine pour poser ces mots et essayer de rendre ce rĂ©cit le plus authentique possible afin que vous puissiez la vivre Ă  mes cĂŽtĂ©s. MĂȘme aprĂšs une semaine, j’ai encore du mal Ă  rĂ©aliser ce qu’il s’est passĂ©, comme si je n’avais pas vraiment fait cette course, et pourtant


2 h du matin, le rĂ©veil sonne. J’ai dormi Ă  peine 3 h 30 et je suis excitĂ©e Ă  l’idĂ©e d’entamer cette course. Le petit dĂ©j’ s’impose, mĂȘme si c’est toujours difficile de manger Ă  cette heure-lĂ , et mes supporters se prĂ©parent. On prend ensuite les derniers sacs avant de quitter le logement et Steph nous dĂ©pose au parc avec ma supportrice attitrĂ©e, Marine, pour dĂ©poser le vĂ©lo. Mes affaires sont dans un sac Ă©tanche : il y a des risques de pluie et je prĂ©fĂšre que tout reste au sec, car je sais que Marine pourra installer mon matĂ©riel avant mon arrivĂ©e de la natation. Nous nous dirigeons ensuite vers la plage pour regarder l’arrivĂ©e de la natation et repĂ©rer un peu le lieu avant de nous rendre au ferry, qui nous emmĂšnera vers l’üle de Brissago pour un dĂ©part Ă  5 h.

Une fois sur place, j’enfile ma combinaison Ă  moitiĂ©. Il fait dĂ©jĂ  chaud, je mets beaucoup de crĂšme anti-frottement et dis au revoir Ă  mes supporters, qui vont vivre une journĂ©e aussi longue que la mienne. Je retrouve Sophie, une athlĂšte que je coach et qui participe elle aussi Ă  la course ; on papote sur le bateau en attendant le dĂ©part et son cĂŽtĂ© « Stress-Free » est rassurant.

L’excitation monte et je dis au revoir Ă  mes supporters restĂ©s sur le port. Ma discussion avec Sophie me dĂ©tend et on profite des 25 minutes de ferry pour papoter. On se dit que, ça y est, c’est parti. Une fois arrivĂ© prĂšs de l’üle, le ferry semble faire demi-tour ; on reste dubitatif et un message au micro annonce un changement pour le dĂ©part de ce Swissman. L’orage arrive ! En effet, les nuages sont trĂšs menaçants derriĂšre nous et se rapprochent du lac. Nous savions que c’était une possibilitĂ© et nous acceptons forcĂ©ment la dĂ©cision de l’organisation, question de sĂ©curitĂ©. Notre crainte ? Devoir courir 12 km avant d’entamer un parcours dĂ©jĂ  compliquĂ©. Heureusement, ils nous proposent un « short swim » d’environ 1200 ou 1300 m (saura-t-on vraiment un jour ?). Ils nous dĂ©barquent au port et nous rejoignons le ponton. On avance doucement, et lĂ , une fusĂ©e est lancĂ©e. Certains se jettent Ă  l’eau ; on se regarde avec Sophie et BenoĂźt du BATT : « Ils se mettent Ă  l’eau pour le dĂ©part ? », et on voit qu’ils nagent dĂ©jĂ  en direction de l’arrivĂ©e. Ok, en fait, ça a dĂ©marrĂ©. On se dĂ©pĂȘche de sauter Ă  l’eau et l’aventure commence, de façon prĂ©cipitĂ©e et dĂ©routante. Quelques coups de bras, le cardio monte, je me demande ce qui se passe : ce dĂ©part prĂ©cipitĂ© m’interpelle. J’essaie de prendre des pieds, puis de me caler Ă  cĂŽtĂ© d’autres nageurs, tout en ayant le voilier avec ses lumiĂšres rouges au loin pour m’orienter.

Je nage, probablement ma meilleure natation depuis mes dĂ©buts en triathlon, mĂȘme si je reste perturbĂ©e par ce qui vient de se passer. La plage est proche, ça y est, j’y arrive : ce fut court mais intense. En sortant de l’eau, je retrouve Marine qui m’attend de pied ferme et court avec moi pour la T1. Tout Ă©tait dans un sac Ă©tanche en prĂ©vision de la pluie, mais elle a anticipĂ© et tout prĂ©parĂ© avant mon arrivĂ©e. Mes affaires sont placĂ©es stratĂ©giquement, je n’ai rien Ă  gĂ©rer, elle a tout fait pour moi. Elle m’aide, m’encourage, me donne petit Ă  petit mes affaires ; on vĂ©rifie que tout est ok, elle m’oblige Ă  manger, un dernier bisou de courage et c’est parti. Je trouve que je mets un peu de temps, mais au final, ma transition est super rapide.

Me voilĂ  partie Ă  vĂ©lo pour un long pĂ©riple. Je trouve une bonne allure, une bonne cadence, je me mets sur les prolongateurs quand je le peux et j’essaie de me dĂ©tendre. L’atmosphĂšre est particuliĂšre, quelques gouttes de pluie, mais de la chaleur, l’impression qu’il fait sombre ou en tout cas que le ciel est menaçant et une sensation Ă©trange apparaĂźt : une oppression et l’envie de rejeter la nourriture que je viens d’avaler. Ça ne passe pas. J’essaie de boire par petites gorgĂ©es et de manger en petites quantitĂ©s, mais c’est compliquĂ©.

Avec mes supporters, nous avons rendez-vous au 50e km, Ă  Bodio. Je m’arrĂȘte en les voyant, inquiĂšte du timing, mais StĂ©phane me dit de calmer le jeu. Je leur explique mes soucis d’alimentation, Marine essaie de m’aider en glissant de la nutrition dans mes poches et je repars vers le Gothard, avec des craintes et un mĂ©lange d’émotions.

70e kilomĂštre : dans quoi est-ce que je me suis embarquĂ©e ? Mes sensations ne sont pas bonnes du tout, les larmes montent, je ne me sens pas en forme et je prends la mesure de la difficultĂ© du parcours, malgrĂ© toute la prĂ©paration et la logistique mises en place. Mes supporters me croisent en voiture, m’encouragent ; les Belges me dĂ©passent et me motivent aussi, ça rebooste, mais je doute, Ă©normĂ©ment. Le « faux plat » vers le Gothard est lĂ , et je fais une grosse introspection pour trouver la force de continuer. J’enchaĂźne une section avec un mix de tarmac et de pavĂ©s, et je retrouve mes supporters Ă  un endroit oĂč je ne m’attendais pas Ă  les voir : ça fait un bien fou. Ils me font rire, changent mes bidons, ma nutrition, mĂȘme si, franchement, peu de choses ont Ă©tĂ© consommĂ©es, et je repars en direction du secteur pavĂ© oĂč l’on se retrouvera Ă  nouveau.

« Un coup de pĂ©dale Ă  la fois » est la phrase que je me suis rĂ©pĂ©tĂ©e tout au long du parcours vĂ©lo. Le secteur pavĂ© me semble plus difficile que ce que j’avais imaginĂ©, mais j’essaie de tenir bon et de garder la cadence qui m’a permis de m’économiser pendant la prĂ©paration. Six kilomĂštres de pavĂ©s, c’est long, mais ça avance. Je dĂ©passe quelques gars que j’encourage, et je vois enfin le bout. Je profite malgrĂ© tout de la montagne environnante, magnifique, des paysages somptueux. Une habituĂ©e de ce format Xtreme, Émilie (du BATT, pour ne pas la citer), m’avait dit quelques jours avant : « Vis-le comme une aventure, un long entraĂźnement. » Alors j’essaie d’en profiter, mĂȘme si c’est dur.

Je passe le col et retrouve mes supporters ; ils m’ont prĂ©parĂ© une chaise, je m’assieds et rĂ©alise que je suis en surchauffe complĂšte. Steph me met de la glace sur la tĂȘte, Marine s’occupe de mes vĂȘtements pour que je puisse me changer complĂštement : nous sommes au 95e km environ. Ils me donnent un sandwich au fromage, probablement la seule chose que je supporterai sur tout le parcours vĂ©lo niveau alimentation. Merci les gars ! Vous avez trouvĂ© ce qui passe. Je me couvre pour la descente et repars ; on se retrouvera en bas pour leur donner mes vestes.

TrĂšs belle descente aprĂšs le Gothard. Je repense Ă  ce qu’on a travaillĂ© en prĂ©paration mentale pour mes virages Ă  droite, plus compliquĂ©s que mes virages Ă  gauche, et je trace ma route tout en explosant mon record de vitesse maximale. Je me sens mieux, le moral est revenu et je prends un maximum de plaisir, direction le Furkapass, oĂč mon Ă©quipe ne peut pas s’arrĂȘter. Je les croise juste avant, je m’arrĂȘte pour donner mes vestes Ă  Marine et c’est parti vers Furka. Je vois le chemin sinueux au loin, je sais que ça sera dur, en plein soleil, mais de nouveau : « un coup de pĂ©dale Ă  la fois ».

Je l’entame, non sans difficultĂ©, mais j’y vais petit Ă  petit. Le vent est parfois contre moi, parfois dans mon dos, et je bĂ©nis les riviĂšres dans le col qui renvoient une bouffĂ©e d’air frais en passant. Je profite des faibles pourcentages pour rĂ©cupĂ©rer, jamais je n’aurais pensĂ© dire cela un jour, pour continuer sur la derniĂšre portion, plus difficile. Je dĂ©passe quelques gars, tout le monde souffre, mais tout le monde arrive en haut. Je m’étonne moi-mĂȘme de la façon dont je passe les cols, en repensant aux difficultĂ©s rencontrĂ©es par le passĂ© dans mes diffĂ©rents entraĂźnements ou courses. Je me rends compte que je suis prĂȘte, tant physiquement que sur toute la logistique en amont dans le repĂ©rage du parcours et du profil et que cette portion bike, je vais la finir.

Mes supporters m’attendent de pied ferme en haut du col. Tout est prĂȘt : je m’installe sur la chaise, Marine s’occupe Ă  nouveau de mes vĂȘtements pour Ă©viter que je ne prenne froid dans la descente, Steph gĂšre ma nutrition et me met de la glace sur la tĂȘte. Quelle Ă©quipe, j’ai de la chance ! Marine me fait un massage des cuisses, qui me font un peu souffrir, et des mollets. Ça fait un bien fou et, grĂące Ă  elle, plus aucune gĂȘne sur le reste du parcours : on est au 122e km ! Avant de repartir, ils me proposent de me brosser les dents pour enlever ce goĂ»t sucrĂ© persistant, Ă  la Courtney Dauwalter, et franchement, c’est top et ça fait un bien fou ! Je n’y croyais pas trop, mais c’est testĂ© et approuvé !

Direction le Grimsel, pas trĂšs loin aprĂšs le Furka. J’entame une descente de folie avec plein de virages plutĂŽt bien nĂ©gociĂ©s. Bon, je me tape quand mĂȘme sur l’ensemble du parcours vĂ©lo quatre feux rouges et deux ou trois voitures qui n’avancent pas, mais ça fait partie du jeu, il faut l’accepter. On dira que ça aura fait un peu de rĂ©cup !

Le premier virage du Grimsel, je l’apprĂ©hendais. En repĂ©rant le parcours sur Maps, j’avais ressenti la mĂȘme crainte que pour l’Alpe d’Huez et son premier virage. Pourtant, sur place, ça se passe bien et je trouve que mes jambes sont encore fortes pour grimper. Je monte en profitant de la vue sur la descente du Furka, sur les montagnes, et des encouragements des supporters d’autres triathlĂštes. TrĂšs chouette ambiance. Mes supporters sont lĂ  aussi : Marine me fait Ă©couter les vocaux et vidĂ©os de mes neveux, c’est trop mignon et ça me booste.

Ils continuent vers le sommet, oĂč ils m’attendent pour la derniĂšre descente. Et lĂ , la pluie commence Ă  tomber. J’arrive au sommet, fiĂšre d’avoir passĂ© tous les cols. Oui, c’était difficile, mais je le vis beaucoup mieux que ce que j’avais imaginĂ©. La pluie s’intensifie, la grĂȘle s’invite aussi, le temps belge est enfin lĂ  ! Je mange et me change, et on se pose la question de la descente et des couches Ă  mettre. Au final, j’enfile veste, gants nĂ©oprĂšne et couvre-chaussures nĂ©oprĂšne, et je ne regretterai pas ce choix.

Je dis au revoir Ă  mes supporters, que je suis censĂ©e revoir un peu plus bas pour me dĂ©lester des vestes et autres, et j’entame cette derniĂšre longue descente avant une derniĂšre bosse, direction la T2.

MalgrĂ© la pluie, je nĂ©gocie bien les virages, tout en restant prudente. Je trace plus vite que prĂ©vu et commence Ă  avoir chaud, j’arrive tout doucement dans la vallĂ©e. J’enlĂšve ma veste et mes gants et passe la bosse Ă  Innertkirchen. Je ne vois pas mes supporters, tant pis, je continue jusqu’à la T2.

Les 10 derniers kilomùtres me semblent longs ; j’ai envie de passer à la suite, mais j’essaie de relñcher mes jambes pour enchaüner avec la course.

Une fois en T2, je vois Marine qui prend mon vĂ©lo et me dit de rejoindre Steph, qui m’aide avec la nutrition et les vĂȘtements. Marine revient, m’aide Ă  me changer et on discute de l’organisation pour la suite. Je leur avais laissĂ© le champ libre pour le suivi et l’accompagnement, avec une entiĂšre confiance en eux. Marine commencera la course avec moi et Steph enchaĂźnera au prochain ravito Ă  VTT.

Avant de quitter la T2, je demande un dernier massage express Ă  Marine, qui m’aide beaucoup. On part ensuite Ă  pied, direction Grindelwald ! Sur cette premiĂšre partie de course, je suis ravie de la partager avec elle : ça me fait un bien fou d’ĂȘtre entourĂ©e, et particuliĂšrement par elle. Elle me soutient, m’épaule, me donne du positif sur ma foulĂ©e, sur mon allure. Bon, en vrai, je pense que je ne courais pas super bien, quand je courais, en tout cas, car j’ai dĂ» marcher dans les montĂ©es : les cuisses Ă©taient quand mĂȘme bien entamĂ©es.

Elle me conseille, me soutient malgrĂ© tout, et on profite du paysage en s’émerveillant devant le lac bleu turquoise, la cascade de Giessbach, les sentiers de trail
 bref, on savoure le moment. Elle prend quelques photos et en profite elle aussi : c’est un chouette partage. On vit toutes les deux cette aventure, et ça ne peut que me remplir de joie.

ArrivĂ©es au premier switch, autour du 8,5e kilomĂštre, Steph est lĂ  Ă  vĂ©lo pour prendre le relais et continuer avec moi ; on entame la suite. LĂ , je cours une plus longue partie plutĂŽt plate et discute avec lui. On rigole, on se raconte deux-trois anecdotes, et on profite aussi du paysage. On Ă©change avec les autres athlĂštes que l’on croise, de chouettes moments. Puis, en regardant en arriĂšre, on se rend compte que la pluie arrive trĂšs vite. J’ai trĂšs chaud, et je me dis que ça me rafraĂźchira, mais j’espĂšre ne pas avoir froid. Marine nous attend au 22e kilomĂštre, ce qui me paraĂźt loin si on se prend la drache. Bon
 on s’est pris la drache. Et j’ai eu froid. Steph envoie un message Ă  Marine pour qu’elle prĂ©voie un t-shirt de rechange et je sens l’hypo arriver. Quand rien ne passe, parfois, il y a un remĂšde : chez moi
 c’est le Coca ! Je rĂȘvais d’un Coca et Marine et Steph ont exaucĂ© mon souhait !

Sur le parcours, je croise Camille, du BATT, avec qui on se double et se redouble, on discute, on s’encourage. C’est chouette de partager ça avec d’autres personnes du club. On sait que Benoüt n’est pas loin, et que mon athlùte Sophie non plus.

ArrivĂ©e au 22e, je bois mon Coca et change de t-shirt. Être au sec, dans des vĂȘtements propres
 franchement, c’est quand mĂȘme trĂšs confortable ! Et lĂ , Marine redĂ©marre avec moi Ă  vĂ©lo. Je dois, en thĂ©orie, les rejoindre au 28e km selon Steph, mais je sens que ma coupure au pied, faite durant la semaine, me gĂȘner en courant. Commence alors une vĂ©ritable bataille mentale contre ma tĂȘte, mon corps, mes Ă©motions. Marine est avec moi, on se dirige vers Grindelwald, et je commence Ă  stresser pour mon timing, de peur de ne pas pouvoir monter les derniers 1000 m de dĂ©nivelĂ© vers Kleine Scheidegg. Marine m’invite Ă  courir davantage, elle sait que j’en suis capable, mais mon corps (ou ma tĂȘte) ne me le permet pas. « Un pas aprĂšs l’autre », je me le rĂ©pĂšte.

Et lĂ , en plus de tous ces doutes, l’orage se met Ă  gronder et on se fait littĂ©ralement rincer. On s’arrĂȘte pour enfiler rapidement une veste, puis on continue, un peu dĂ©sarçonnĂ©es, en direction du checkpoint. Je commence vraiment Ă  accuser le coup ; au final, ce n’est pas au 28e mais au 33e km qu’on se verra pour le dernier ravito, qui est aussi le checkpoint. Le moral est bas, vraiment bas. On partage avec Marine des Ă©motions fortes, et les larmes montent pour toutes les deux. On se soutient, on est lĂ  l’une pour l’autre ; c’est une grosse journĂ©e, autant pour moi que pour elle, et on doit ĂȘtre fortes toutes les deux. Les amis, les neveux, la famille envoient des audios et des vidĂ©os de soutien, ça m’aide Ă©normĂ©ment. Je sais que Marine a froid, car mon allure est trĂšs lente dans les montĂ©es ; je n’ai pas envie qu’elle prenne froid ou qu’elle se sente mal, j’essaie de la soutenir aussi : c’est un vrai travail d’équipe.

Un peu plus loin, StĂ©phane nous rejoint avec le vĂ©lo de Françoise ; ils Ă©changent les rĂŽles avec Marine, qui repart se changer avant la montĂ©e. Elle m’expliquera plus tard qu’elle avait demandĂ© Ă  Steph de venir plus tĂŽt, tant elle avait froid et sentait que j’avais besoin de soutien. Il resterait environ 2,5 km : j’y suis presque, tout en Ă©tant dans les temps pour le checkpoint, malgrĂ© mes craintes. Le moral revient, et la pluie s’est arrĂȘtĂ©e ; on arrive sur le parking, j’en profite pour me changer et manger un peu. Mes supporters se prĂ©parent aussi Ă  monter, Marine a pu se rĂ©chauffer, et Françoise s’occupe de toute la logistique avec la voiture et le train. Marine, StĂ©phane et moi, on se dirige ensuite vers le checkpoint pour montrer nos sacs ; tout se passe bien, c’est parti pour la montĂ©e. Quand je vois par oĂč on commence, le stress monte vraiment tant c’est raide, et je sens que ça va ĂȘtre long et compliquĂ©. La fatigue est bien prĂ©sente, le mental bien entamĂ©, et le physique aussi.

Partager cette derniĂšre Ă©tape Ă  trois est vraiment agrĂ©able : on discute, on profite du paysage incroyable de Grindelwald, et StĂ©phane en profite pour se lĂącher en montĂ©e, racontant et faisant des conneries comme il sait si bien le faire. Marine et moi, on rigole, elle me soutient et me conseille, me dit plein de choses positives, mĂȘme si elles ont du mal Ă  rentrer dans ma caboche.

Je trouve la montĂ©e trĂšs raide, je sens que c’est vraiment dur, mais le soutien de mes supporters est incommensurable ; grĂące Ă  eux, je continue d’avancer. La nuit commence Ă  tomber, on savoure ce moment diffĂ©remment. Steph arrive encore Ă  me faire courir, et j’arrive mĂȘme Ă  prendre du plaisir dans cette montĂ©e : alors on relance de temps en temps ! Dans la pĂ©nombre qui s’installe, on aperçoit au loin les drapeaux de l’arrivĂ©e et le flash de l’appareil photo. Ça me rappelle la FlĂ©gĂšre pendant la CCC, oĂč j’étais vraiment dans le mal, et oĂč je savais qu’aprĂšs, il ne restait plus que la descente vers Chamonix pour finir. Les Ă©motions sont fortes, la joie est immense. Je sais que ce n’est plus trĂšs loin, mais cela me paraĂźt sans fin.

Mon corps commence Ă  me lĂącher, j’ai envie de dormir, j’essaie de continuer Ă  marcher, mais je perds l’équilibre ; Marine et Steph me soutiennent pour ne pas que je tombe. Je rĂ©alise que je n’ai rien mangĂ© pendant la montĂ©e, une fois de plus parce que, depuis le dĂ©but du vĂ©lo, je ne supporte pas grand chose au niveau de la nutrition. Et malgrĂ© ça, j’y suis presque. Il doit rester un kilomĂštre avant la fin. Petit Ă  petit, on avance, et j’entends Françoise crier : « Allez AdĂšle ! » Ça y est : si elle est lĂ , c’est que je suis vraiment tout prĂšs.

Pas aprĂšs pas, on avance : derniĂšre pente, derniĂšre montĂ©e, derniĂšres marches d’escaliers. Ça y est, on y est. On sort les drapeaux et on avance, ensemble.

Depuis le dĂ©but, mes supporters ont Ă©tĂ© prĂ©sents ; ils sont lĂ  avec moi pour savourer cette arrivĂ©e, cette ligne tant attendue qui me paraissait inaccessible. Je suis Ă©mue, comme je m’y attendais ; je vois le flash de l’appareil photo, Frankie filme la scĂšne, j’y suis ! J’enlace tout le monde et remercie mon Ă©quipe ; je partage ce moment avec Marine, qui est elle aussi passĂ©e par toutes ces Ă©motions, un mĂ©lange de hauts et de bas, mais tellement fort. Je la prends dans mes bras : cette course restera une aventure gravĂ©e dans ma mĂ©moire.

Marine sort le coureur des bois, santĂ© tout le monde !

Au-delĂ  d’un parcours exigeant et extrĂȘme, j’ai vĂ©cu quelque chose de fort, physiquement, mentalement, collectivement, humainement. Au 70e km, j’ai cru lĂącher, et j’ai finalement continuĂ©. AprĂšs la course, on a discutĂ© avec Marine de tout ce qui s’était passĂ©. C’était difficile Ă  dĂ©crire, difficile Ă  expliquer. J’ai aussi retrouvĂ© mes sachets de boissons iso Ă  moitiĂ© vides. Dubitative, j’ai demandĂ© Ă  Marine si c’étaient bien les sachets utilisĂ©s pour le vĂ©lo ; elle m’a rĂ©pondu oui. Du coup, je me suis rendue compte que non seulement je n’avais pas beaucoup mangĂ©, mais qu’en plus mes bidons d’iso, que je croyais suffisamment chargĂ©s en glucides, ne l’étaient qu’à moitié : c’est donc pour ça qu’ils n’étaient pas si sucrĂ©s en goĂ»t
 oups. Cela fait partie du jeu aussi, et je l’accepte. Chaque supporter avait un rĂŽle, et ils l’ont assurĂ© avec brio. Le principal, c’était d’arriver au bout et cet objectif est validĂ©.

Je peux aussi ĂȘtre plus que contente de n’avoir rencontrĂ© aucun problĂšme physique. Mon tibia a tenu, et je remercie Blaise et Yves pour leur aide et leur gestion avant la course, qui m’ont permis de rĂ©aliser et d’atteindre cet objectif. MalgrĂ© les soucis et obstacles rencontrĂ©s en amont, je suis arrivĂ©e au bout de cette course. NOUS sommes arrivĂ©s au bout de cette course.

Cette aventure, l’avoir vĂ©cue ensemble, l’avoir vĂ©cue avec Marine, a créé quelque chose de fort pour nous deux. C’est parfois difficile de dĂ©crire les Ă©motions que l’on vit durant ce genre de parcours, mais en tout cas, je les ai pleinement vĂ©cues.

Merci encore Ă  ceux qui Ă©taient prĂ©sents, ceux qui m’ont suivie Ă  distance, ma famille, mes amis, ceux qui m’ont encouragĂ©e pendant la semaine, et toutes les personnes croisĂ©es sur le parcours ! Bravo Ă  Camille, Benoit, Sophie & CĂ©line, les belges prĂ©sents Ă©galement sur le parcours.

Un immense merci Ă  Yves qui n’est pas seulement un coach mais aussi un alliĂ©, un mentor, un ami. Il est arrivĂ© dans ma vie Ă  un moment oĂč tout Ă©tait chaotique, entre une grosse charge mentale et une grosse charge d’entraĂźnement. Il a toujours su adapter mes sĂ©ances, jongler avec ma vie professionnelle et personnelle, en prenant en compte mes hauts et mes bas. Il m’a appris Ă  m’écouter, Ă  exprimer quand ça n’allait pas, Ă  remettre les choses en perspective quand le doute s’installait.

MĂȘme en tant que coach, on a parfois besoin d’un coach, d’un repĂšre, d’un confident Ă  qui on peut dire « LĂ , je ne sais plus ». Et Yves a toujours Ă©tĂ© lĂ , Ă  l’écoute, avec confiance, prĂȘt Ă  m’aider Ă  retrouver le bon chemin. Il me connaĂźt, il savait que j’allais pouvoir rĂ©ussir Ă  gĂ©rer cette course.

Merci Yves, pour ton soutien, tes conseils, et pour ĂȘtre, tout simplement, une personne exceptionnelle.

Place maintenant Ă  la rĂ©cupĂ©ration : l’ébauche d’un plan Ă  trĂšs long terme, avec des objectifs encore plus fous, est en cours de prĂ©paration.


Il y a des parcours de vie parfois plus difficiles que d’autres, des chemins plus compliquĂ©s, des rencontres qui vous changent, des embĂ»ches, des courses aussi. Chacun traverse cela Ă  sa maniĂšre, mais quoi que vous fassiez, continuez d’avancer. Il faut parfois changer de chemin pour atteindre sa destination, parfois faire une pause pour faire le plein. Ne renoncez pas Ă  vos rĂȘves : tout est possible, et parfois il faut simplement se donner du temps pour y arriver. Continuez de croire en vous, car vous en ĂȘtes capables.

It’s all about yourself


Partenaires

Un immense merci Ă  tous mes partenaires qui m’ont aidĂ©e Ă  m’équiper, Ă  me prĂ©parer et qui m’ont soutenue dans chacune de mes aventures. C’est aussi grĂące Ă  vous que j’ai pu aller au bout de ce dĂ©fi.

Une réponse

  1. bravo AdÚle tu es arrivée à finaliser ton objectif avec l aide de ceux qui t ont entouré et soutenu sur le terrain.
    on est fier de soi quand on arrive à son but contre vent et marées comme on dit..

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